« Il n’est pas simple de s’asseoir sur un nuage quand on a décidé de rester debout à l’intérieur de soi »

 

Cette phrase, de Daniel Meurois, rassemble à elle seule, pour moi, la posture interne vers laquelle tendre.

 

La posture juste

 

Certes, il y a l’attention au corps et l’ergonomie du praticien. La posture physique est éminemment liée aux tensions et déséquilibres que nous portons tous. Inviter à trouver plus d’aise dans la pratique, c’est l’ergonomie, c’est adapter les contraintes de la pratique aux réalités de son corps. Forcer une posture n’est jamais une bonne solution. Cela va induire plus de crispations, donc une pratique de moindre qualité.

Pareil en zazen, la posture juste est celle la mieux adaptée aux réalités physiques. C’est par une pratique et une attention constante, que le dos se redresse. 

 

Dans cet article, j’ai plus envie d’évoquer la posture interne. Celle liée au mental, à la psychologie, aux émotions. Nous ne pouvons rien mettre à part: notre corps reflète notre état intérieur. En shiatsu, nous traitons le corps-esprit. Une tension psychologique ou émotionnelle va induire une crispation physique. Nous ne sommes pas parfait. Nous portons aussi nos sacs de problèmes. Faire semblant d’être au-dessus de tout cela, c’est feindre et (se) mentir.  Le receveur, le patient, peut devenir un magnifique miroir de ce qui se vit en nous. Notre responsabilité est d’oser ouvrir nos fenêtres intérieures, de regarder au fond de nous pour oser être authentique. 

Sortir du paraître pour incarner être

C’est un chemin.

 

La place du zen et des arts martiaux 

 

J’ai découvert le Zen et la pratique du zazen en 2000. Cela complétait magnifiquement ma pratique de l’aïkido et de la méditation tibétaine.

J’aimais ce cadre austère en apparence et épuré de l’aïkido et du zen. L’un me semblait répondre à l’autre. J’ai pu vite comprendre que la pratique martiale n’est pas juste un apprentissage technique pour éviter de se faire péter la truffe ou prendre le dessus sur « l’autre ». Non. Le seul adversaire que j’avais, c’était Moi, celui qui dit Je. Pour l’affronter, j’ai dû en faire le tour, l’observer. C’est la danse de 2 combattants qui se jaugent et s’évaluent. Je est toujours le plus fort, en apparence et à court termes. Il faut ruser et l’utiliser, pour finir par l’apprivoiser et en faire son allié. 

 

Dans le dojo d’aïkido, Je était confronté à lui-même par le corps.

Pendant le zazen, Je se confrontait par l’esprit. 

Par “esprit”, j’intègre tout ce qu’il porte de réflexions, de psychologie, d’émotions, d’élans philosophiques et spirituels.

Le zen m’a ensemencé de concepts et d’invitations à aller au-delà, sur l’autre rive.

C’était comme une vrille qui cherchait le chemin vers une source profonde…

Posture interne et chemin intérieur.

 

Dans ce chemin, à travers les pratiques du zen, l’aïkido, du shiatsu, J’ai pu voir mon arrogance, mon envie de surpasser, mon esprit de compétition. J’ai senti ma sensibilité, ma révolte, mon envie de sauver. J’ai touché des limites et ma fragilité.

J’ai dû accueillir tout cela et bien plus. Accepter que tout est là et que je ne pourrai pas tout.

 

Alors, le compétiteur a vu qu’il était meilleur que certains, moins que d’autres. Le sensible a accepté de pleurer pour ce qui le dépasse et de rire aussi. Le revolté a trouvé la façon d’utiliser cette énergie qui le rongeait du dedans. Le sauveur a dit  « ok, à défaut de sauver le monde et de tenter d’effacer la souffrance, je vois comment utiliser ces souffrances pour en faire de la lumière. ».

Je a cru qu’il allait mourir, il a bien tenté de se débattre. Puis il a compris que mourir est inévitable et que mourir à Je, c’est naître à soi. Au final, une danse s’est installée entre Je et soi, du Je en Soi, du Soi en Je.

Oser voir et accepter de mourir, c’est accepter et oser vivre.

Une souplesse est apparue…

 

« Plier, se dresser.

Céder et vaincre »

(Lao Tseu)

 

Rien ne naît, rien ne meurt, tout se transforme.

Pour (se) transformer, il faut accepter de naître et de mourir, pour renaître ensuite.

 

Ainsi, dans toute pratique, dans toute thérapeutique, interroger, questionner et chercher la porte. Non, celle du savoir qui reste enfermé dans sa tour d’ivoire crânienne. La porte de l’être authentique et d’accueil le et accueille avec le sourire de la météo du jour.

 

“Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déja existantes se combinent, puis se séparent à nouveau”

(Anaxagore)